Paoustovski, L’homme du dégel

Paoustovski,
L’homme du dégel

Sophie OLLIVIER

Collection « Espaces littéraires »

Alors qu’on s’interroge sur les bouleversements subis par la société russe, les mutations impliquées par le changement de système, la place de la Russie en Europe, le moment est venu de se tourner vers Konstantin Gueorguievitch Paoustovski (1892-1968). Cet écrivain a su, de façon subtile, remettre en question une idéologie qui a prôné, selon l’expression d’Hannah Arendt, « la destruction de l’identité individuelle », et ainsi sauvegarder la quintessence de son art. Aux laideurs et aux horreurs engendrées par un système axé sur la manipulation des corps et des âmes il a opposé la vision d’un univers harmonieux où le charme ensorcelant d’une nature humble et mélancolique demande à être découvert pas à pas. Je me souviens que le philosophe Michel Henry, aujourd’hui disparu, m’avait dit qu’il éprouvait une grande admiration pour Paoustovski parce que ce dernier avait peint le moment fugitif, la seconde où la feuille se détache de la branche et tombe à terre. « Comment y est-il parvenu ? », s’étonnait-il. De grandes lignes de force se dégagent de son oeuvre : la perception de la vie comme une suite de courts instants d’épiphanie, le culte de la beauté opposée à l’idéologie, le sentiment que l’homme est responsable devant le cosmos et l’histoire, la création définie comme « la collecte des merveilles » ou « des poussières d’or » enfouies dans la vie, la purification de la « sanie » qui peut la ternir, la foi dans le rôle éternel de l’art qui est de soigner les hommes et de les aider à vivre, de les mettre en garde contre les dangers de la déshumanisation.

Sophie OLLIVIER, professeur honoraire à l’Université de Bordeaux 3. Viceprésidente de l’International Dostoevsky Society. Auteur d’essais et d’articles sur la littérature russe et l’histoire irlandaise.

 

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