Alexandra (Александра). Un film d’Alexandre Sokourov

Cinéma Russie L’association Rivages Russie évènement
présentent
JEUDI 18 OCTOBRE

20 h 00 Cinéma le Grand Action
réservation en ligne : legrandaction.com
5 rue des écoles – 75005 Paris
Alexandra (Александра)
Un film d’Alexandre Sokourov
En présence de Georges Nivat

Alexandra est une babouchka, une de ces grand-mères généreuses dont la littérature et le cinéma russes ont toujours exalté le bon sens et la raison populaire. Dans le camp militaire de Tchétchénie où elle s’en vient rendre visite à son petit-fils, Sokourov la fait arriver sur un char d’assaut qui n’a rien d’héroïque. Il ressemblerait plutôt au radeau de la Méduse, sur lequel flotteraient des militaires fantômes…

Le tissu de l’humain dans le regard et la voix de Sokourov
Sokourov est un étonnant visionnaire ; son univers visuel déroute totalement et tyrannise : on ne voit plus qu’à travers son regard. Il aime commenter ses films sans se montrer : on entend sa voix douce, insistante, qui accompagne, insiste, complète la partition visuelle. Ses prises de position politiques ne sont pas politiques, elles sont existentielles, comminatoires, sur fond de fin du monde, et de notre vie, au bord d’un gouffre, comme dans son film Faust où le vieux savant, avide de jeunesse et de refaire le monde, erre avec Méphisto entre les geysers bouillants d’un volcan.

Alexandra, superbement jouée par Galina Vichnievskaïa , interroge les témoins et les victimes de la guerre en Tchétchénie; entre la femme russe venue voir son petit-fils officier, et les femmes tchétchènes qui pleurent leurs fils disparus s’établit une silencieuse, mystérieuse, imprécise solidarité. C’est le tissu de l’humain, recousu par Sokourov.
Sokourov pratique le genre de l’élégie, une sorte de pleur rituel devant la douleur du monde parfois il le jumelle avec le genre de l’entretien-silence. Car s’il aime interroger les acteurs du monde ce n’est pas pour les interviewer au sens habituel du terme, c’est pour partager avec eux silence, doute, foi secrète. Parmi les entretiens que Sokourov a filmiquement écrits, ceux qui ont eu lieu chez Alexandre Soljénitsyne, pendant plusieurs journées et heures, dans le jardin de sa propriété à Troïtse-Lykovo, à l’ouest de Moscou, sont les plus représentatifs de ces dialogues-silence. On y entend et voit le vieux maître, au visage creusé et à la barbe maigre de starets, c’est-à-dire de vieux moine qui a la con- naissance secrète des cœurs. On y entend la voix, on y devine la main, le bras de Sokourov, mais jamais le visage. Serait-ce un confessionnal ? C’est en tout cas une longue élégie où le Maître dit ,avec d’étonnants sursauts de jeunesse, sa désillusion du monde et sa foi de chrétien peu obéissant…
Georges Nivat.


Date : 18.10.2018
Lieu : 5 rue des écoles - 75005 Paris
Contacts : legrandaction.com

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